FICTIONS DOCUMENTAIRES
3ème édition du festival de la photographie sociale de Carcassonne

A l’occasion de sa troisième édition, qui se tiendra du 15 novembre au 14 décembre 2019, le festival Fictions Documentaires met à l’honneur les talents de la photographie sociale. Pour son dixième anniversaire, le Réseau Diagonal, dont le GRAPh est membre fondateur, aborde la thématique de l’engagement. C’est autour de cette notion que les six talents de Fictions Documentaires se rassemblent. Photographie, vidéo, installation multimédia… Toutes les pratiques se mettent au service de cette perspective singulière de l’art et des questionnements de société.

[…] il s’agit de continuer de se positionner entre reportage et pratiques plasticiennes, pour affirmer que des photographes travaillant sur le terrain, avec des individus ou des communautés, trouvent ensuite de nouvelles formes que l’on peut revendiquer comme fictions documentaires.

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Le GRAPh, Groupe de Recherche et d’Animation Photographique,  porte de mieux en mieux son nom ; il allie plus que jamais à la fois animation et recherche photographiques, grâce à sa pratique de prédilection, la photographie sociale. Cette pratique profondément humaine, cette exploration de la marginalité, des impasses de la société, est le médium qui permet aux publics touchés par les actions du GRAPh de s’investir à la fois comme objet et comme sujet de la pratique photographique.

|En allant au-delà du regard documentaire désincarné, la photographie sociale est mise à l’honneur au sein de la structure grâce à d’étroites collaborations entre les artistes contemporains et les publics, qui regardent et se regardent, qui découvrent une condition en se découvrant, qui parlent en photographiant de ce qu’est la vie à l’échelle humaine.  Plus que le sujet-même de la création, c’est la pratique de la photographie qui devient sociale, collaborative, solidaire, quand le public devient auteur. Des thématiques sociales variées sont perçues à travers le prisme de ces différents groupes créatifs (ateliers avec des personnes malvoyantes, des femmes de la communauté gitane de Berriac, des jeunes issus des quartiers politiques de la ville, ateliers pratiques amateurs adultes et enfants…).

A l’occasion de ce festival  autour  de la photographie sociale, le GRAPh vient s’inscrire dans ce contexte régional favorable à la  création photographique (Visa pour l’Image, les Rencontres Photographiques d’Arles, Images Singulières…), tout en y apportant une sensibilité immédiate, issue de la relation créative fusionnelle entre ses publics et les artistes qui prennent l’initiative de venir travailler en collaboration avec eux.

|Avec cette manifestation, un festival impliqué défendant des pratiques sensibles,  il s’agit de continuer de se positionner entre reportage et pratiques plasticiennes, pour affirmer que des photographes travaillant sur le terrain, avec des individus ou des communautés, trouvent ensuite de nouvelles formes que l’on peut revendiquer comme fictions documentaires.

Christian Gattinoni, conseiller artistique du festival


| PROGRAMMATION

Cette année, six auteurs nous proposent leurs démarches autour de ce thème de l’engagement, pour former une programmation d’excellence, qui mêle une nouvelle fois perspective sociale et approche profondément poétique. Emeric Lhuisset, Alexandra Pouzet et Bruno Almosnino, Arno Brignon, Emilie Arfeuil, Michaël Duperrin et le Collectif VOST sont mis à l’honneur dans différents lieux de la ville.

MICHAËL DUPERRIN, Odysseus

(c) Michaël Duperrin | Hans Lucas

Michaël Duperrin,  par un détour poétique et mythologique, donne une lecture métaphorique de l’émigration à travers une longue série photo et vidéo, poursuivie pendant dix ans : Odysseus, un passager ordinaire. Il prolonge cette approche dans sa relation avec de jeunes migrants, auprès desquels il mène une résidence d’artiste à Carcassonne, effectuée dans le cadre du nouveau dispositif d’éducation à l’image du Réseau Diagonal. Espace Hamilton / 30, rue Armagnac.

EMILIE ARFEUIL, Sang-mêlé

(c) Emilie Arfeuil

Emilie Arfeuil propose une exposition transmédia autour de portraits de Carcassonnaises de « sang-mêlé », rencontrés au cours de sa résidence de création au GRAPh, dressant ainsi une ethnologie de la ville écrite à travers ses habitants, issue de l’immigration et du métissage. Archives départementales de l’Aude / 41, avenue Claude Bernard.

COLLECTIF VOST, Photographier l’exil

(c) Olivier Sarrazin

Pour ouvrir encore le dialogue, le Collectif VOST met en place des installations mêlant photographies, textes, dessins, cartes et vidéos autour des œuvres de ses artistes (Françoise Beauguion, Matthieu Rosier, Olivier Sarrazin, Lucie Bacon) et de ses artistes invités (Michaël Duperrin, Marion Potoczny, William Gaye, Guillaume Moreau, Robin Jafflin, Oriane Bault, Fanny Dollberg, Gilles Ogier, Justine Roquellaure et Laura Laffon). Tous et toutes travaillent à l’unisson pour tenter de montrer comment Photographier l’exil. Espace Hamilton / 30, rue Armagnac.

ARNO BRIGNON, La formation des vagues

(c) Arno Brignon

Arno Brignon parie à fond sur l’argentique pour développer le partage de création avec des populations locales rencontrées dans diverses résidences en région et à l’international. Sa série La formation des vagues accepte l’imperfection d’une représentation qui balbutie la force de ces rencontres dans des territoires dévastés. Maison de la Région / 5, rue Aimé Ramond.

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ALEXANDRA POUZET + BRUNO ALMOSNINO, ça me regarde

(c) Alexandra Pouzet

Le partage de création s’effectue aussi entre Alexandra Pouzet, photographe, et Bruno Almosnino, historien et anthropologue, autour d’enquêtes en prise avec des publics inscrits dans leurs territoires. Leur série Ça me regarde (2017) explore les liens entre la jeunesse et les nouveaux régimes climatiques qui nous menacent. Maison des mémoires / 53, rue de Verdun.

ÉMERIC LHUISSET, Chebab

(c) Emeric Lhuisset

A côté de ces recherches singulières de jeunes auteurs il est important pour le festival de montrer des  artistes pionniers de ces fictions documentaires. C’est pourquoi nous sommes très heureux  d’exposer Emeric Lhuisset. Sa série Chebab émane d’un plan-séquence de 24 heures capturé au naturel par un combattant de l’armée syrienne libre. La diffusion de captures d’écran de cette vidéo sur Instagram, avant la reprise pour notre festival en un millier de petits tirages, interroge l’expérience quotidienne avec des images de la réalité de la guerre dans toute sa banalité. Chapelle des Dominicaines / 17, rue de Verdun.


| TEMPS FORTS DU FESTIVAL

RENCONTRES CRITIQUES
Les rencontres critiques sont à l’initiative du conseiller artistique de Fictions Documentaires, Christian Gattinoni ; échange public entre artistes et spécialistes, elles représentent l’opportunité de faire un retour riche sur les travaux proposés dans le cadre du festival, ainsi que d’aller au-delà de l’image pour avoir accès à l’univers et à la démarche créative de l’artiste. (entrée libre)

Emeric Lhuisset + Charlotte Flossaut (Photo Doc – Paris)
Vendredi 15 novembre, 18h, Maison des Mémoires, 53 rue de Verdun.

Alexandra Pouzet et Bruno Almosnino + Pascal Beausse (responsable de la collection photographique du CNAP)
Samedi 16 novembre, 10h, Maison des Mémoires, 53 rue de Verdun.

Arno Brignon + Rodrigo Gomez Rovira (Festival International de Photographie de Valparaiso)
Samedi 16 novembre, 15h, Maison de la Région, 5 rue Aimé Ramond.

LECTURES DE PORTFOLIOS
Pour montrer, rencontrer, consulter et échanger avec les professionnels invités : photographes, galeristes, directeurs artistiques, responsables d’agences photographiques, critiques d’art …

|Vendredi 15 novembre, de 10h à 13h puis de 14h à 17h, Chapelles des Dominicaines, 17 rue de Verdun.


Ouvert à toutes et à tous, gratuit sur réservation au 04.68.71.65.26 ou par mail : cmigraph@gmail.com.

DIAPERO
Avec Diapéro, le vidéaste Alexandre Liebert revient offrir un moment de découverte et de convivialité aux festivaliers et amateurs du film photographique. Projections, débats rencontres… dans le respect de la devise de Diapéro : “des images, du son et des bières”.

|Samedi 16 novembre, 19h, Guinguette du Païchérou, 2 quai du Païchérou (entrée libre).

BRUNCH DES EDITIONS PHOTOGRAPHIQUES

Présentation de livres d’auteurs-photographes parus en 2019 et table ronde « l’édition photographique aujourd’hui » en présence des auteurs et des éditeurs.

|Dimanche 17 novembre, 11h, Maison des Mémoires, 53 rue de Verdun (entrée libre).

CINÉ-CONCERT

Le projet multiforme MONOTONE.LAB propose la diffusion en live de la première adaptation de 1984 au cinéma, réalisé par Michael Anderson en 1956.
Ce film britannique, basé sur le célèbre roman de science-fiction politique de George Orwell, raconte l’oppression dictatoriale dans un monde moderne de la surveillance, où même les plaisirs fondamentaux sont devenus des délits.

|Dimanche 17 novembre, 16h, Auditorium de la Chapelle des Jésuites, rue des études (entrée libre).


| PHOTOGRAPHIE SOCIALE : ENJEUX

Avec l’affirmation de Fictions Documentaires comme l’un des moments importants de la photographie contemporaine en France, le GRAPh inscrit la pratique sociale de la photographie dans le paysage culturel régional et national. Ainsi mise à l’honneur, elle occupe toute sa place de révélateur des évolutions de nos sociétés, de catalyseur de perspectives nouvelles et de réflexion poétisée.

[…] la photographie dialogue avec d’autres média, avec les mots, avec le son, pour pouvoir trouver le parfait équilibre et éveiller au mieux les sentiments humains d’empathie, de compassion et amener le spectateur à, lui aussi, pénétrer la marge.

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Depuis toujours, la photographie sociale se concentre sur le sujet, l’humain, l’individu. Cela est toujours vrai de cette pratique, qui est restée empreinte de compassion et de valeurs de fraternité ainsi que de justice et d’égalité entre les hommes. Cependant, tout au long du XXème siècle jusqu’à nos jours, la perspective que les photographes participant de cette pratique ont adoptée a sensiblement évolué.

|Bien qu’ils restent concentrés sur les problématiques des conditions de vie de certaines strates de la société, et bien qu’ils continuent de traiter ces thématiques à travers le particulier et l’individuel, on constate que la démarche s’est subtilement déplacée au niveau moral.

Les photographes fondateurs de cette pratique de la photographie sociale basaient leur travail sur certains cas-types dans lesquels le spectateur pouvait lire l’étendue de la pénibilité des conditions de vie ou de travail d’une communauté plus large. L’individu était donc l’ambassadeur de problèmes dépassant sa seule existence, le photographe désignait ses modèles comme les porte-paroles, les visages de situations dénoncées par le medium de l’art. On voit les personnes placées dans le flot de l’histoire et de la société, comme éléments constituants et victimes de leurs excès.

|Plus récemment, avec l’évolution des mentalités vers une attention croissante portée sur la personne, vers un individualisme tout libéral, on observe une photographie sociale qui fait du modèle le sujet au cœur de l’image et du propos de l’artiste. A travers l’intimité de l’individu, à travers un vécu singulier, on lit les stigmas laissés par les mouvements de société. La tendance dans cette dialectique particulier/universel  semble donc s’être inversée ; d’une figure humaine qui n’était qu’une goutte d’eau dans l’océan de l’injustice sociale, on est passé à ce corps qui occupe l’espace de la photographie pour montrer, à une échelle absolument humaine, ce que c’est que d’exister aujourd’hui, souvent malgré les résistances que notre société nous oppose.

Ces marginalisations, ces situations d’injustice, d’isolement, de souffrance, la photographie sociale entreprend de les donner à voir à un spectateur, aussi immédiatement que possible, avec autant d’empathie et de fidélité que possible. Le medium tente, par le regard et la narration, de rendre justice à ces sujets qui lui préexistent ; car la photographie sociale est dépendante de son sujet. Il s’agit d’être appelé par une histoire et une perspective sur la vie pour pouvoir la mettre en images ; la photographie sociale refuse la fiction et l’embellissement, sans toutefois se priver d’adopter un regard qui ne prétend plus à l’idéal irréaliste de l’objectivité mais qui au contraire le transcende.

|La photographie sociale, en cela qu’elle tache de dépasser la seule description factuelle, s’attache à poser les questions d’identité individuelle et d’identité collective, de majorité et de marge, de la réalité psychologique face au fait de société. Par ce dualisme entre description désengagée et militantisme assumé, les artistes proposent des travaux et propos nuancés, où la photographie dialogue avec d’autres média, avec les mots, avec le son, pour pouvoir trouver le parfait équilibre et éveiller au mieux les sentiments humains d’empathie, de compassion et amener le spectateur à, lui aussi, pénétrer la marge.

Mathilde Alsina


L’EQUIPE DU FESTIVAL

Christian GATTINONI,  conseiller artistique | Eric SINATORA, direction artistique
Mathilde ALSINA, coordination | Dorine MORA, médiation | Frank NIZIER, régie

cmigraph@gmail.com | 04.68.71.65.26

Maison des Associations | Place des Anciens Combattants d’Algérie

11000 CARCASSONNE

(c) Michaël Duperrin / Hans Lucas
(c) Michaël Duperrin / Hans Lucas
(c) Emilie Arfeuil
(c) Emilie Arfeuil
(c) Emeric Lhuisset
(c) Emeric Lhuisset
(c) Olivier Sarrazin / Collectif VOST
(c) Collectif VOST
(c) Arno Brignon
(c) Arno Brignon
(c) Alexandra Pouzet et Bruno Almosnino
(c) Alexandra Pouzet et Bruno Almosnino